(1888-1971)
Né en 1888 à Warkworth, en Ontario, John Albert Blezard a fait partie d’un petit groupe de médecins dont le dévouement a stimulé le développement de l’anesthésie au Canada pendant la période déterminante de l’entre-deux-guerres. Quoiqu’il ait été conservateur dans sa propre pratique de l’art de l’anesthésie, il était suffisamment ouvert d’esprit pour reconnaître la nécessité de la recherche et pour encourager ses étudiants à utiliser de nouveaux médicaments et de nouvelles techniques. Selon les normes de l’époque, le Dr Blezard avait reçu une bonne formation : il avait obtenu son diplôme de l’Université Queen’s en 1914, fait son internat à New York avant de pratiquer comme généraliste puis pratiqué l’anesthésie au sein du Corps médical militaire royal du Canada pendant la Première Guerre mondiale. Il a jugé son enseignement réussi lorsque ses étudiants sont devenus plus accomplis que lui. Homme peu loquace, mais d’une grande vision, le Dr John Blezard a assuré un leadership bienveillant et généreux en tant qu’anesthésiste universitaire, tout d’abord à Edmonton (de 1920 à 1937) et ensuite à London (de 1937 à 1958).
La carrière d’anesthésiste du Dr Blezard a débuté en 1916 lorsqu’il a été affecté aux hôpitaux de l’Armée canadienne en Angleterre, où il a aussi servi dans les hôpitaux de l’Armée britannique. De 1917 à 1919, il a poursuivi son travail d’anesthésiste auprès des ambulances de campagne canadiennes en France. Comme de nombreux autres anesthésistes canadiens de cette époque, il a appris l’anesthésie en la pratiquant et aussi en observant les anesthésistes britanniques expérimentés, dans le creuset de la guerre. Le Dr Blezard était de ceux qui excellent dans ces circonstances, affinant ses compétences par la simple nécessité de son travail d’anesthésiste militaire. De retour au Canada après la guerre, il a continué de se tenir au fait des progrès en anesthésie. Ainsi, à London, il a aimé être le premier à effectuer une intubation de la trachée sous vision directe, le premier à utiliser le cyclopropane et, plus tard, les myorelaxants. Ses deux objectifs étaient de fournir à ses patients des soins de qualité en anesthésie et d’enseigner à ses étudiants dans la pleine mesure de ses capacités.
Son adhésion au
Anesthetists’ Travel Club a été pour lui d’une valeur inestimable. En se joignant à ce groupe sélect au moment de sa fondation en 1929, il a pu échanger des connaissances et des idées au sujet de nouveaux développements en anesthésie avec d’éminents anesthésiologistes américains, plus particulièrement avec J.S. Lundy, A.E. Guedel et R.M. Waters. Il a donc pu ramener à Edmonton et dans l’Ouest canadien des informations sur les nouveaux agents anesthésiques tels que le cyclopropane et le thiopental sodique. Son association avec ces chefs de file en anesthésie et avec d’autres membres canadiens, principalement avec Harry Shields et William Easson de Toronto et Wesley Bourne et Harold Griffith de Montréal – l’a convaincu que la spécialité de l’anesthésie devrait se développer de façon indépendante. Il a dû tirer beaucoup de satisfaction de pouvoir constater les jalons de ce développement au cours de sa propre carrière : l’approbation de la certification en anesthésie par le Collège royal en 1942, la fondation de la Société canadienne des anesthésistes en 1943, la création d’un département d’anesthésie indépendant à l’Université Western Ontario en 1949 et la création du titre d’associé en anesthésie par le Collège royal en 1951.
Le Dr Blezard, premier chef du Département d’anesthésie à l’Université Western Ontario, a démissionné de la présidence en 1958. Il a laissé derrière lui une base solide sur laquelle d’autres ont pu bâtir. Même si les fondations d’un édifice solide sont rarement apparentes et trop souvent prises pour acquises, elles doivent être mises en place soigneusement et sans précipitation. Le Dr John Albert Blezard était l’un de ces pionniers qui ont bien investi leur temps en le consacrant à bâtir des fondations afin que d’autres puissent ériger la construction.
David A.E. Shephard MB FRCPC, Saskatoon
CAN J ANAESTH 1994 / 41:2 / p 156